11 août 2022 | Ateliers

Les contraintes et la créativité en atelier d’écriture

“Je pensais que la contrainte allait me bloquer, en fait, elle m’a aidée !” Combien de fois ai-je entendu cette remarque à la fin d’un atelier d’écriture ? Presque à chaque session ! 

C’est vrai, vous vous inscrivez pour écrire, c’est déjà un défi avec une pointe d’appréhension. Alors, vous pensiez que je vous faciliterais la tâche et dès les premières minutes, je vous dis quoi ? Que vous ne serez pas libres et qu’il faudra répondre à des contraintes ! Mais qu’est-ce que vous faites ici ? Pourquoi vous êtes vous inscrit·es ? C’est trop dur, vous n’allez jamais y arriver !

Pourtant, après une contrainte comme « écrivez en commençant par tel mot » ou « écrivez une liste en moins de 2 minutes » ou d’autres, les lignes sont apparues, des textes sont nés, et chaque personne remarque étonnée que, c’est un fait, elle a écrit.

Comment est-ce possible ? Quels pouvoirs ont les contraintes ? Que provoquent-elles ? Et donc pourquoi les inviter en atelier d’écriture ?

Après des années à vivre cette expérience en animant des ateliers d’écriture, je suis partie à la recherche d’autres sources et études pour cerner et mettre des mots sur ce processus.

Superpouvoir n°1 des contraintes d’écriture : se mettre en mouvement

Le syndrome de la page blanche

Même si on a envie d’écrire, notre cerveau peut se bloquer avant de débuter, c’est le fameux syndrome de la page blanche. Les idées et les questions arrivent par dizaines et nous paralysent. On souhaite tellement bien faire qu’on ne sait même plus par où commencer.

L’OULIPO pour se lancer

La contrainte d’écriture en atelier ne laisse pas de place à la page blanche : dès les premières minutes, une proposition vous attend. Cette consigne peut s’appuyer sur des ressources reconnues tel que l’OULIPO, l’Ouvroir de littérature potentielle, connu pour ses multiples défis. On se concentre alors sur une contrainte technique : intégrer un mot précis, écrire un alexandrin, commencer par une phrase imposée, peu importe. À partir du moment où notre réflexion est détournée, l’impulsion est donnée !

Le résultat ? Ces témoignages des participantes :
– Les contraintes m’ont aidée à passer le cap. Lucie
– Tes propositions étaient pour moi fluides et inspirantes, elles créaient une ambiance et la progression permettait de bien lancer la machine !  Maëva
– La « prouesse » réside dans le fait qu’à aucun moment je n’ai eu la sensation d’être dans un exercice scolaire. Les propositions d’écriture étaient variées. Élise

Superpouvoir n°2 des contraintes d’écriture : détourner la censure

Pour commencer un écrit, toute une partie de l’enjeu est de dépasser les premières lignes. Une contrainte technique peut donc nous donner l’impulsion. Pourtant, il reste toujours à gérer notre mental. Celui qui vient nous murmurer que telle idée n’est pas bonne, que tel mot n’est pas juste, que ça ne sert à rien de continuer.

La petite voix de la censure

Ici encore la contrainte d’écriture va venir contrarier celle que j’appelle notre petite voix de la censure. Vous la connaissez : c’est la voix de la résistance, la voix du doute, bref, l’autocensure qui prend le pas sur notre envie. Pour lever ce frein, l’atelier avec ses propositions, et surtout son temps limité, provoque l’occasion de se lancer sans trop réfléchir. Il faut produire des mots en quelques minutes, et pour ça, je vous mets à disposition des béquilles sur lesquelles s’appuyer : la contrainte.

Un espace propice à l’écriture

Lors d’un atelier d’écriture, en tant qu’animatrice, c’est moi qui crée le lieu propice à l’expression. Un lieu d’expérimentation bienveillant où l’écriture est facilitée. Grâce à ma formation, je peux vous offrir un cadre et un déroulé qui vous guide étape par étape pour éviter tout blocage et toute douleur. Après quelques séances, vous pourrez reproduire ces sessions seul·es, mais ne tentez pas cet exercice trop vite chez vous ;).

L’autorisation d’écrire

Avec les contraintes, vous n’avez plus toute la responsabilité de votre texte : l’angle, le thème ou la forme peuvent être imposés. Vous partez dans une drôle de direction ? Le rythme est particulier ? Vous pourrez toujours accuser l’animatrice et vous n’avez pas à assumer ce résultat. Pratique et reposant, non ?

écrire créativité

 

Superpouvoir n°3 des contraintes d’écriture : aider la prise de décision

S’il nous arrive de bloquer devant notre feuille, de douter parmi les idées venues, c’est souvent parce que nous nous trouvons face à trop d’options. Nous sommes perdus face à trop de choix, ce qui provoque une forme d’inaction. Une trop grande liberté ne nous guide pas et nous restons sans bouger à la croisée des chemins.

Réduire les possibilités

Par leurs conditions déterminées et précises, les contraintes obligent à prendre une direction. Les options sont limitées, tout comme le temps, vous êtes donc poussés à vous lancer. Et si leur énoncé peut vous intimider, une fois que vous osez leur faire confiance, elles déploient leur potentiel : “Au début, les contraintes me font peur, finalement elles deviennent mes alliées”. Exactement comme une deadline ou un budget restreint guide un projet.

Déléguer les choix

Vous pourriez passer des journées à vous demander comment raconter une scène, de quel point de vue, via quel personnage. Si la contrainte d’écriture du jour vous impose la première personne du singulier en voix de la narration, le choix est fait. Avec une décision de moins à prendre, vous êtes plus disponible pour explorer cette possibilité. Plutôt que de restreindre votre liberté d’auteur ou d’autrice, vous allez découvrir tout un pan de cette histoire. De la même façon, toute autre contrainte donnera un fil, une direction à votre texte naissant.

Choisir des contraintes pour s’inspirer

Hors de l’atelier, les contraintes peuvent être de répondre à un concours d’écriture en respectant le thème et la longueur ou de s’imposer une routine d’écriture précise comme celle de Stephen King : 2000 mots par jour ou celle d’Amélie Nothomb, écrire de 4 heures à 8 heures du matin. Des chiffres à adapter, évidemment !

Superpouvoir n°4 des contraintes d’écriture : développer ses capacités d’adaptation

Grâce aux contraintes en atelier d’écriture, vous êtes maintenant lancés, vous avez contourné votre autocensure, vous avez une direction à suivre. Ça y est, elles ont donné tout ce qu’elles avaient à offrir ? Eh bien non.

Ouvrir l’imaginaire

En acceptant de suivre une proposition extérieure, vous vous autorisez à prendre des chemins inconnus. Dans cet espace, vous découvrez des idées inattendues, des souvenirs oubliés, des thèmes insoupçonnés. Vous n’auriez jamais pensé à vous aventurer sur ces territoires, et pourtant, vous avez des choses à en dire, et à en écrire ! Plutôt habituée au réalisme, vous vous découvrez un goût pour le fantastique, plutôt texte long, vous vous essayez à de courts poèmes. Tout est possible, laissez-vous surprendre par vous-mêmes, comme Elisa : « Les exercices d’écriture permettent de stimuler l’imagination, de délier sa plume… » et Rhaïssa « L’opportunité d’écrire des bouts d’histoires inattendus que je n’imaginais pas pouvoir produire ».

Dépasser les obstacles

Contraints par des limites, vous êtes maintenant obligés de valoriser les ressources disponibles. Ce qui paraissait évident, inutile ou banal, prend alors une autre dimension : vous le détournez avec un regard neuf, vous le sublimez, vous le transformez avec originalité pour créer de nouveaux textes. Vous n’auriez pas envisagé ce mot, ce style avec d’autres outils sous la main. Cette notion de résilience, ce système D, que l’on s’approprie de plus en plus au quotidien est souvent sous-estimée dans le domaine de l’écriture. À vous de vous dépasser, volontairement.

Devenir polyvalent

Lors de la conception d’un atelier d’écriture, je choisis des propositions d’écriture variées. Ainsi, je vous aide à conscientiser l’artisanat du texte. Les extraits de livre et vos propres productions ne sont plus des mystères. On y dévoile les trucs, astuces et techniques d’écriture. Vous vous les appropriez lors de nos temps, puis vous êtes capables de les appliquer sur vos projets personnels. Les contraintes permettent de maîtriser petit à petit les différents aspects de l’écriture. Vous êtes alors capables de vous réinventer et d’innover.

La contrainte artistique libératoire

Commencer l’écriture, détourner l’autocensure, faciliter les décisions, développer ses capacités d’adaptation, les bénéfices des contraintes artistiques sont multiples. De restrictives, elles deviennent… libératoires ! On comprend mieux pourquoi de nombreux artistes font appel à elles.

« Parce que la forme est contraignante, l’idée jaillit plus intense ! » écrit Charles Baudelaire à propos du sonnet, dans une Lettre à Armand Fraisse datant du 18-19 février 1860. Le poète nous fournit le parfait exemple de contrainte libératoire : elle vient stimuler sa créativité. Cet outil, d’abord imposé par l’extérieur, est détourné dans l’écriture, la peinture, le dessin, l’architecture, toute forme de création, pour s’inspirer. Retenons cette définition : la contrainte artistique volontaire est une contrainte artistique utilisée sciemment comme un moteur créatif.

Curieux de voir ce que les contraintes provoqueront et apporteront à votre écriture ? Découvrez leurs super pouvoirs en vous inscrivant à un atelier d’écriture, une expérience en toute sécurité ! Après la pratique, observez leurs effets sur vos mots et votre style.

 

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